La tique (Arachnides / Acariens / Parasitiformes / Ixodidés / Ixodes ricinus)
Comme les araignées, les tiques appartiennent à la classe des arachnides, ils possèdent 4 paires de pattes (à noter que les larves n'en ont que 3), mais ne sont pas classés dans l’ordre des Araneae, mais dans celui des Ixodida qui appartient à la sous-classe des acariens. Les acariens regroupent un très grand nombre d’espèces, plus de 55 000 espèces sont connues, mais le nombre d’espèces encore inconnues est bien supérieur.
Les acariens comptent des espèces de quelques dixièmes de millimètres et d’autres dépassant le centimètre. Les plus gros acariens sont justement les tiques, qui comptent plus de 860 espèces recensées pour 18 genres. Les tiques sont hématophages, ils se nourrissent exclusivement de sang. Se sont des ectoparasites intermittents, c’est-à-dire qu’ils se fixent à l’extérieur de leur hôte et uniquement pendant certaines périodes de leur cycle.
Description Chez la plupart des arthropodes, le corps est segmenté en 3 parties : tête, thorax et abdomen. Ce n’est pas le cas des tiques où seules deux parties sont visibles, la tête et le reste du corps appelé idiosome.
Les tiques adultes à jeun mesurent entre 3 et 6 mm, mais les femelles gorgées de sang peuvent atteindre 15 mm. Les individus photographiés dans cet article mesurent 3,1 mm de la pointe du rostre au bout de l’idiosome.
Les tiques ont un aspect piriforme aplati dorso-ventralement et deviennent ovoïdes après un repas sanguin.
Le gnathosome (la tête de la tique) Les tiques ne possèdent pas d’yeux, mais peuvent disposer de zones sous-cutanées sensibles à la luminosité, voire d’ocelles pour certaines espèces. La tête de la tique (capitulum) porte trois pièces buccales qui forment le rostre. L’espèce présentée présente un rostre plus long que large, elle est qualifiée de « longirostre ».
- Les pédipalpes, au nombre de deux, sont des organes sensoriels qui analysent par contact l’environnement proche. - Les chélicères, au nombre de deux, peuvent coulisser sur l’hypostome grâce à des muscles. Chez les araignées se sont les chélicères qui permettent la morsure. Chez la tique, elles portent de très fines dents à leur extrémité et par des mouvements d’avant en arrière elles pénètrent progressivement dans la peau. - L’hypostome est une sorte de stylet avec plusieurs rangées de dents inversées selon le principe de l’hameçon.
L’idiosome (le corps de la tique) La face dorsale de l’idiosome montre une zone rigide sclérifiée en forme d’écusson le « scutum », il est de couleur noire pour l’espèce photographiée. Celui-ci couvre la totalité du corps du mâle, mais seulement la moitié pour la femelle. Cette dernière devant pouvoir se gonfler de sang, l’idiosome doit être extensible.
Sur la face ventrale, on peut voir l’insertion des 8 pattes. Chacune d’elles se termine par deux griffes et une ventouse qui permettent à l’animal de s’accrocher à tous types de supports.
La première paire de pattes porte l’organe de Haller. Il s’agit d’un organe disposant de soies sensorielles capables de détecter la présence d’un animal par détection du gaz carbonique qu’il produit. Sur la troisième photographie, vous pouvez voir une tique en position d’affût caractéristique, les pattes antérieures, portant l’organe de Haller, étendues. Si la tique détecte une augmentation de concentration en CO2 ou de température ou une variation de luminosité, elle se laissera tomber sur son hôte potentiel, ou à côté !
Cycle évolutif Le cycle des tiques, comme pour tous les acariens, comporte quatre étapes : - L’œuf - La larve - La nymphe - L’adulte
Une femelle fécondée va pondre au sol entre 500 et 5 000 œufs. Au bout d’un mois environ les œufs vont éclore et donner une larve.
La larve va trouver un hôte et effectuera un seul repas sanguin. Elle se détachera et une fois au sol se métamorphosera en plusieurs semaines en une nymphe.
La nymphe va procéder exactement comme la larve et après un unique repas va se métamorphoser en adulte. Cette deuxième métamorphose est encore plus longue, de 1 à 4 mois.
La femelle adulte va de nouveau se fixer sur un hôte et prendre un repas important, elle va pomper du sang pendant 5 à 10 jours, alors que les mâles ne s’alimenteront pas. Si un accouplement se produit, le mâle meurt rapidement, la femelle pond et meurt également.
Suivant le climat, un cycle complet pourra se dérouler en un an ou au contraire s’étaler sur deux à quatre ans.
Hôtes Chez les ixodes photographiés dans cet article, les larves choisiront comme hôtes des micromammifères et des reptiles. Les nymphes feront de même en ajoutant des oiseaux, et des mammifères de taille moyenne à grande. Les adultes se fixeront essentiellement sur des ongulés (chevreuils, sangliers, etc.).
Alimentation et mécanisme de la morsure À l’aide de ses pédipalpes, la tique choisit une zone intéressante. Les chélicères vont alors coulisser et s’enfoncer dans la peau de quelques dixièmes de millimètres et vont s’écarter l’une de l’autre à leur extrémité constituant ainsi un point d’ancrage (comme pour une cheville pour placoplâtre). Elles vont ensuite se rétracter entrainant par réaction la pénétration de l’hypostome. Comme l’hypostome porte des dents inversées, il ne peut ressortir et s’enfonce un peu plus à chaque rétractation des chélicères. Ce mécanisme se produit plusieurs fois jusqu’à ce que l’intégralité de l’hypostome ait pénétré dans la peau, soit environ 0,5 à 1 mm. Cette opération se produit sous anesthésie locale ! En effet, la tique libère une substance anesthésiante de manière à rendre indolore et donc discrète la morsure. Une fois implantée, la tique va produire un cément, une substance salivaire blanche qui va se solidifier et jouer le rôle d’une colle pour améliorer la fixation de l’acarien. La tique va ensuite injecter de la salive dans le canal formé entre les chélicères et l’hypostome. Cette salive contient des enzymes protéolytiques, des anticoagulants, des substances vasodilatatrices, des toxines et peut véhiculer, par la même occasion, toutes sortes de pathogènes, dont en particulier des bactéries spirochètes du genre Borrelia responsable de la maladie de Lyme.
Cette salive va en partie détruire les tissus et faire éclater des capillaires sanguins, la tique n’a plus qu’à pomper le sang ainsi libéré.
Voir une étude détaillée en anglais sur ce mécanisme, avec des photographies au microscope du rostre : RoyalSocietyPublishing
Répartition L’ixodes ricinus est une espèce présente essentiellement en Europe.
Habitats Les tiques se rencontrent dans différents milieux, mais il semble qu’une humidité importante soit nécessaire à leur survie et en particulier à celle des oeufs. Les tiques se rencontrent donc particulièrement en forêt, dans les haies et clairières. J’en ai souvent observé dans les clairières à carex, où ils se positionnent en haut des tiges. Je mettrai un bémol à l’affirmation qui dit que les tiques ne tombent pas des arbres, mais se trouvent sur les herbes proche du sol. Les deux cas existent. J’ai observé plusieurs fois des tiques en position d’affût sur des feuilles d’arbres à hauteur de visage. Les animaux et les promeneurs peuvent donc récupérer des tiques en passant sous de petits arbres ou des arbustes.
Les populations de tiques diminuent à mesure que l’altitude augmente à partir de 800 m et disparaissent quasiment à partir de 1500 m.
Pour ces raisons, dans le Jura, vous courez davantage de risque au printemps et en automne.
Prédateurs Les tiques sont consommées par les lézards, certains oiseaux, les musaraignes et certains arthropodes.
La limitation des populations de tique passe par le maintien d’une biodiversité importante et en particulier par le contrôle des rongeurs par les renards et des ongulés par les grands prédateurs tel le lynx. Dans ce contexte, il serait bien d’arrêter la destruction des renards.
Avec le réchauffement climatique et la diminution des hivers rudes, les tiques colonisent de plus en plus de milieux.
Voir ci-dessous un article sur la liaison entre renard et maladie de Lyme et une belle vidéo sur les préjugés associés au renard : lapierredesaintmartin.org
En cas de morsure par une tique
- Vous devez l’enlever le plus vite possible, les risques de contamination augmentent fortement après 16 heures de fixation.
- Utilisez une pince à tique (voir photographie) pour dévisser proprement la tique.
- S’il s’agit d’une larve minuscule, la pince à tique ne pourra pas être utilisée, prendre dans ce cas une pince à épiler.
- Ne pas presser le corps de la tique pendant l’opération.
- Ne pas appliquer de substances avant de l’avoir retirée.
- Désinfecter à l’alcool ou à l’eau oxygénée après retrait.
- Vérifier la zone concernée les jours qui suivent. Si une auréole rouge de grand diamètre apparait, consulter un médecin, il vous placera peut-être sous antibiotiques.
En ce qui me concerne, j’ai déjà été piqué plusieurs dizaines de fois, mais je les ai toujours enlevées dans les douze ou seize heures, sauf une fois une larve que j’ai gardée sous la peau pendant deux jours, croyant que c’était une piqure de moustique ! Pour le moment, il ne me semble pas avoir été contaminé…
Livres et thèses Pour l’identification des tiques, il y a l’ouvrage « Les tiques » de Claudine Pérez-Eid, paru en 2007 aux éditions Tec & Doc Lavoisier, mais malheureusement épuisé.
Pour la biologie des tiques, il existe cet ouvrage très complet : Tiques et maladies à tiques : Biologie, écologie évolutive, épidémiologie de Karen D McCoy et Nathalie Boulanger paru en 2016 aux éditions IRD.
Pour ceux qui veulent creuser le sujet et en particulier pour les problèmes qu’ils causent aux bovins, vous pouvez consulter la thèse de 2008 de Jean-Baptiste FRANCOIS à l’université Henri Poincaré de Nancy 1, intitulée : Les tiques chez les bovins en France.
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